Depuis quelques jours, ma fille dit très souvent dans la journée que sa mamie lui a acheté « des bottes de pluie qui brillent, une guitare, un hélicoptère qui fait de la musique, une trottinette, etc », alors que ce n'est pas vrai. Et je me demande si elle parle de rêves et d'envies, si elle veut me faire croire cela ou si elle affabule, et cela m'inquiète un peu. De plus, je ne sais pas quoi lui répondre, car je ne veux pas lui dire que ce sont des mensonges et risquer de lui faire du chagrin. Comment réagir ?
La réponse de Laurence Dudek :
L'usage du terme « vrai » est bien souvent restrictif pour les enfants. Il l'est pour tous d'ailleurs, adultes compris, car si l'on considère le fonctionnement de notre cerveau sans nous restreindre à la seule interprétation de nos observations par nos filtres mentaux (ce que nous croyons savoir et que nous appelons « la réalité »), l'immense majorité des informations que nous utilisons pour nous construire n'est pas « vraie ». Ainsi, nous jouons à être des personnages, tour à tour, avec des panoplies et des costumes, nous faisons croire que nous sommes « vrais », alors qu'en réalité nous savons qu'au fond de nous, le secret de qui nous sommes est bien gardé... Les enfants, eux, n'ont pas encore érigé ces barrières de protection, car elles sont liées à des apprentissages sociaux. C'est pourquoi votre petite fille joue à avoir reçu des cadeaux imaginaires et vous invite à jouer avec elle. Bien sûr, elle sait fort bien qu'elle n'a pas reçu ces chaussures qui brillent : d'ailleurs, si vous lui demandez de vous les montrer, elle ira sans doute chercher un autre objet ou bien elle vous montrera ses pieds ou ses mains vides en disant « Regarde, elles sont là ! » En fonction de vos réactions, elle se sentira autorisée à donner suite à sa créativité et à sa liberté imaginaire pour se faire du bien et pour faire des expériences extraordinaires que le « réel » limite (par exemple visiter une autre planète, devenir un tigre ou traverser les murs), ou elle se sentira restreinte par ce que nous appelons « la réalité » ou « la vérité », et qui n'existe qu'au travers des filtres de nos interprétations et de nos limites mentales.
