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Vie quotidienne

Comment parler de l'inceste et des violences sexuelles avec les jeunes enfants ?

L’ignorance ne protège pas les enfants. Il est donc nécessaire de les informer avec des mots adaptés à leur âge, mais aussi de respecter leur intimité et d’apprendre à les écouter pour dialoguer en confiance sur ce sujet délicat mais très important. Voici quelques conseils pratiques pour commencer la prévention dès le plus jeune âge.

Sensibilisez les jeunes enfants

Dès la naissance, sachez que le corps de votre enfant ne vous appartient pas. Un bébé n’est pas une chose. Ce n’est pas un jouet mignon qu’on peut passer de bras en bras, qu’on expose dans la famille ou sur les réseaux sociaux, et dont on peut disposer comme on veut. C’est une personne qui a des droits et qui doit être traitée avec autant de respect et de délicatesse qu’un adulte, y compris pendant le bain, la toilette, et les gestes de soin. 

Dès 3 ou 4 ans, apprenez à votre enfant que son corps lui appartient, et que certaines parties de son corps sont des parties intimes. Ce sont les parties du corps recouvertes par le maillot de bain. 
Vous pouvez les énumérer et les nommer avec l’enfant avec son vocabulaire habituel (« zézette », « trou des fesses », etc.). Vous pouvez également lui apprendre les mots des adultes pour désigner ces parties du corps (pénis, vulve, anus, poitrine). 
 

Les règles à respecter :

–    On ne montre pas ses parties intimes. 
–    On ne regarde pas les parties intimes des autres. 
–    On ne touche pas les parties intimes des autres. 
–    Ces règles s’appliquent à tous les enfants et à tous les adultes. 
–    Même moi je n’ai pas le droit de toucher tes parties intimes. 
–    Ces règles s’appliquent à toutes les personnes de la famille. 
–    Dès qu’on est assez grand, on se lave tout seul. 
–    Dès qu’on est assez grand, on va tout seul aux toilettes. 
–    Il n’y a aucun jeu pour les enfants qui implique les parties intimes (énumérez les jeux avec votre enfant : « Est-ce qu’on a besoin de toucher les parties intimes pour jouer au Monopoly® ? au Lego® ? au foot ? » etc.). 
–    Une seule exception : pour soigner les bobos, avec l’accord des parents. 

Consentement obligatoire

« Mon corps c’est mon corps, le tien c’est le tien ! » Les activités qui impliquent le toucher ne sont permises qu’avec l’accord de la personne (adulte ou enfant) qui est touchée. Même pour un câlin, des chatouilles, ou un bisou, si ça fait « non » à l’intérieur, l’enfant doit apprendre à dire « non ». Attention, ça ne fonctionne que si les adultes et enfants de la famille respectent ce « non » !

 

Faites preuve de pédagogie 

• Expliquez et montrez l’exemple 

Testez la compréhension de l’enfant avec des cas pratiques, en lui demandant si tel ou tel geste est autorisé ou interdit. Par exemple : chatouiller sa cousine : oui, si elle est d’accord. Lui mettre la main dans la culotte : non, jamais. Vous pouvez également utiliser les dessins ou les coloriages (colorier les parties du corps qu’on a le droit de toucher, si l’autre personne est d’accord). 

– La répétition est la base de la pédagogie : n’hésitez pas à rappeler les règles et à montrer comment elles s’appliquent dans les situations de la vie quotidienne. 

– La pédagogie c’est aussi l’exemple : montrez un vrai respect de l’intimité de tous les enfants et adultes de la famille. Valorisez les comportements respectueux des enfants et des adultes. N’obligez pas l’enfant à avoir des contacts non désirés avec les adultes : pour dire bonjour à mamie, le bisou n’est pas obligatoire. En revanche, la politesse et le sourire sont obligatoires. 

• Répondez à ses questions 

Prenez le temps d’écouter votre enfant et de répondre à toutes ses questions : 

–    Non, aucune partie du corps n’est sale ou dégoûtante. 
–    Oui, tu peux toucher les parties intimes de ton corps (pour te laver par exemple) mais pas devant les autres. 
–    Oui, les adultes se font parfois des caresses sur les parties intimes. Mais ce sont les adultes qui font ça, quand ils sont tous les deux d’accord. Les enfants sont trop petits pour cela. 

La question préférée des enfants est : « Pourquoi ? »

–    Parce que ton corps est à toi. 
–    Parce que tu dois respecter les autres et leur intimité. 
–    Parce que ça peut être très grave et que tu peux te sentir très mal si un adulte ou un enfant touche tes parties intimes, même si tu ne dis pas « non ». 

Consignez les questions et les réponses par écrit dans le cahier de prévention de l’enfant (un modèle de cahier de prévention peut être téléchargé sur le site de Face à l’inceste).

Gare aux vilains secrets ! 

Dites à votre enfant que si un adulte ou un autre enfant lui fait des choses en disant « C’est un secret, tu ne dois pas en parler. » alors c’est très important d’en parler à ses parents ou à l’école. L’enfant doit bien comprendre que si la personne lui demande de « garder le secret », c’est parce qu’elle a fait des choses interdites. 

Bien sûr il y a des « gentils secrets » qui sont autorisés, comme la préparation d’un cadeau-surprise pour la fête des mères, à distinguer des « vilains secrets » qui font du mal.

Pas de tabou 

Si l’enfant a l’impression que la sexualité est un sujet tabou et qu’il est interdit d’en parler, cela pourra l’empêcher de libérer sa parole. 
L’ignorance ne protège pas les enfants, tandis que la parole juste et véridique des parents peut beaucoup les aider. J’insiste là-dessus : le déni et le tabou font partie du problème. Si vous-même avez peur de parler de sexualité, comment espérer que ça soit facile pour votre enfant de vous appeler à l’aide ? De comprendre ce qui lui arrive ? De trouver les mots pour en parler ?

Si vous avez été victime vous-même…

Attention, les pédocriminels ont tendance à récidiver. L’inceste peut se reproduire sur la génération suivante si on ne l’arrête pas. Posez-vous les bonnes questions : 

  • En ai-je parlé à mon conjoint ? 
  • En ai-je parlé à un médecin ou thérapeute ? 
  • Quand et comment en parler avec mon enfant ? 
  • Comment éviter de laisser des enfants seuls avec mon agresseur ? 

C’est souvent difficile et parfois risqué de sortir du silence, mais c’est d’une importance vitale. Sachez que vous n’êtes pas seul(e), que des professionnels spécialisés, des associations peuvent vous aider.

• Une limite : l’intimité de chacun 

La limite pour satisfaire la curiosité naturelle des enfants, c’est le respect de l’intimité de chacun. Si votre enfant vous demande « Est-ce ma grande sœur fait l’amour avec son copain ? » ou « Combien de fois vous avez fait ça papa et toi ? » vous pouvez lui répondre que cette question est déplacée car il doit respecter la vie intime des autres. 

• Communiquez dans les deux sens 

Parler avec votre enfant c’est aussi rester à l’écoute, attentifs à ce que ressent l’enfant, prêts à répondre à ses questions. On peut aborder des sujets difficiles comme la maladie, la violence ou la mort avec de jeunes enfants. Il faut prendre le temps, chercher une parole qui explique, qui rassure, qui donne du sens, qui est adaptée à la maturité de l’enfant et à son vocabulaire. Ne fuyez pas les sujets difficiles. L’angoisse de ne pas comprendre ce qui se passe et le mutisme des adultes peuvent être terribles pour votre enfant. 

Cultivez la bienveillance 

Travaillez en partenariat avec votre enfant, cultivez la confiance et la bienveillance tout en posant des limites claires. Votre enfant doit savoir que vous serez toujours là pour l’aider, et non pour le punir ou le juger. Si votre enfant craint d’être puni, ou s’il a l’impression que sa parole est mise en doute, il gardera le silence. Il a aussi besoin que vous posiez clairement les limites. 

Le signalement, mode d’emploi 

Informez votre enfant sur les moyens pratiques de signaler les violences sexuelles que lui-même ou un camarade de classe pourrait subir (1 fois sur 4 c’est à un autre enfant qu’un enfant victime se confie en premier). 
Ces moyens sont : 
–    parler à un adulte de confiance (dressez une liste d’adultes de confiance dans le cahier de prévention) ;
–    téléphoner au 119 ; 
–    écrire si on a du mal à parler.

Les 3 règles d’or :  

  1. Répondez à toutes les questions. 
  2. Dites toujours la vérité. 
  3. N’ayez pas peur. 

Cet article vous a plu ? Découvrez d'autres conseils dans le dernier livre de Patrick Loiseleur :

Les violences sexuelles : Prévenir. Détecter. Accompagner

Pour en savoir plus sur les violences sexuelles (pour les adultes et adolescents) :
•    L’inceste : 36 questions-réponses incontournables, Isabelle Aubry et Gérard Lopez, Dunod, 2017 
•    Le livre noir des violences sexuelles, Muriel Salmona, Dunod, 2019 
•    « Conduites prostitutionnelles chez les mineurs : guide pratique à destination des parents » ACPE (www.acpe-asso.org
•    Guide du Parent Protecteur, association Face à l’inceste (facealinceste.fr) 
•    La première fois j’avais 6 ans, Isabelle Aubry, Pocket, 2010
•    Au-delà de l’irréparable, Jonathan Delay, Louise Courteau, 2021
•    Comment j’ai surmonté l’inceste, Isabelle Aubry, J. Lyon, 2010 78 
•    Pornland : Comment le porno a envahi nos vies, Gail Dines, Libre, 2020 
•     https://jeprotegemonenfant.gouv.fr

 

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